Le moment charnière de la transition du Canada vers un transport scolaire à faibles émissions de carbone peut soit exacerber, soit atténuer les inégalités.  

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Peterborough, le 3 septembre 2025 – Alors que plus de deux millions d’enfants reprennent le chemin de l’école à travers le pays, l’Alliance canadienne pour l’électrification des autobus scolaires (ACEAS) lance un appel aux décideurs : assurer une transition vers les autobus scolaires électriques qui ne laisse personne derrière. 

Intitulé « Faire place à l’équité dans la transition vers les autobus scolaires électriques au Canada », le rapport analyse les impacts sociaux, économiques et environnementaux de cette transition sur différents groupes, notamment les communautés autochtones et les élèves en situation de handicap, et ce, à toutes les étapes du cycle de vie des autobus : de l’extraction des ressources et de leur fabrication, jusqu’à leur adoption, leur utilisation et leur mise au rebut. 

Le moment choisi pour la publication de ce rapport est crucial. Avec moins de 4 % des 51 000 autobus scolaires du Canada actuellement électriques, la transition se trouve à un moment décisif. Près de 70 % de ces 51 000 autobus seront remplacés au cours des 2 à 7 prochaines années. Le moment est venu de veiller à ce que ces autobus soient remplacés par des modèles électriques de manière à remédier aux inégalités plutôt qu’à les renforcer. 

« Nous nous sommes tellement concentrés sur la mise en circulation d’autobus électriques que nous n’avons pas posé les questions difficiles », explique Valérie Tremblay, auteure principale du rapport et responsable de la mobilité durable chez Green Communities Canada.

« Pourquoi les communautés autochtones n’y ont-elles toujours pas accès, alors même qu’elles supportent les coûts de l’extraction des ressources? Pourquoi ne concevons-nous pas davantage d’autobus scolaires électriques équipés de rampes d’accès pour fauteuils roulants et ne les déployons-nous pas sur les itinéraires desservant les enfants handicapés? Où vont les autobus diesel et électriques à la fin de leur durée de vie? C’est en posant ces questions que nous pouvons donner un sens à cette transition et la rendre équitable. » 

« L’équité n’est pas une question secondaire, c’est la clé pour que les autobus scolaires électriques fonctionnent pour tout le monde », souligne Nicole Roach, directrice en mobilité durable chez Green Communities Canada. « Lorsque nous planifions l’inclusion, nous construisons des systèmes plus intelligents, plus solides et plus durables. » 

Les recommandations et les informations sur leur contexte et leur impact sont énumérées ci-dessous, notamment la conception universelle des autobus, l’amélioration de l’accès au financement, l’amélioration des conditions de travail, les programmes de développement de la main-d’œuvre, le renforcement des mécanismes d’élimination et des pratiques d’extraction plus responsables. 

Le rapport fournit des détails sur la manière dont chaque recommandation s’applique aux gouvernements et ministères fédéraux et provinciaux spécifiques. 

Recommandations dans leur contexte : 

  1. Veiller à ce que tous les nouveaux autobus scolaires électriques soient accessibles en mettant à jour les directives d’achat et les normes de sécurité afin de prendre en charge une gamme plus large de modèles dotés de caractéristiques de conception universelles.
    • Les risques liés aux fumées de diesel sont particulièrement préoccupants pour les élèves handicapés, qui sont deux fois plus susceptibles de développer de l’asthme. Les fumées de diesel contiennent des particules, des vapeurs et des gaz cancérigènes, liés aux problèmes cardiaques, à l’asthme et aux troubles cognitifs. En éliminant les émissions d’échappement, les autobus scolaires électriques réduisent l’exposition à ces polluants, améliorant ainsi l’assiduité scolaire et les résultats scolaires. Les élèves signalent également moins de maux de tête et un plus grand confort dans les autobus scolaires électriques.
  • L’autonomie limitée des minibus les plus souvent utilisés pour transporter les élèves handicapés physiques posent des problèmes. La plupart des autobus scolaires de taille normale peuvent désormais être équipés d’élévateurs pour fauteuils roulants à l’arrière, ce qui contribue à répondre à ces préoccupations en matière d’équité.
  1. Améliorer l’accès au financement des autobus scolaires électriques dans les communautés autochtones, les communautés défavorisées et les zones mal desservies sur la base des données sur la qualité de l’air et du recensement concernant les résultats en matière de santé.
  • Les coûts liés aux autobus dans les communautés autochtones et isolées sont au moins deux fois plus élevés que ceux des opérateurs provinciaux ou urbains. En Alberta, par exemple, le transport d’un élève en milieu urbain coûte 363 dollars, contre 1 279 dollars pour un élève vivant dans une communauté nordique ou isolée. Des facteurs tels que l’éloignement, les distances plus longues et le mauvais état des routes (augmentation de la fréquence et du coût des réparations) contribuent à cette disparité.
  • Les communautés autochtones et isolées sont souvent confrontées à des contraintes de capacité qui entravent l’accès au financement. Par exemple, un seul membre du personnel peut assumer plusieurs rôles : directeur, chauffeur de bus, enseignant, etc. Cela laisse peu de temps à ces communautés pour remplir des demandes de financement complexes, telles que celles du Fonds pour le transport en commun à zéro émission.
  • Les contraintes géographiques et infrastructurelles compliquent encore davantage l’adoption dans les communautés autochtones et isolées. Plus de 170 communautés autochtones sont hors réseau et ne bénéficient pas des projets énergétiques menés sur leurs terres.
  • Les communautés situées dans des climats plus froids doivent également composer avec une autonomie réduite des batteries des véhicules électriques.
  1. Améliorer les salaires et les conditions de travail du personnel chargé du transport scolaire en augmentant le financement opérationnel et en incluant des normes de salaire minimum vital dans les contrats.
  • Les autobus scolaires électriques améliorent les conditions de travail des chauffeurs en offrant un air plus pur et un environnement moins bruyant. Cependant, les limitations d’autonomie peuvent également restreindre la capacité des travailleurs(-euses) à effectuer des trajets extra scolaires qui constituent une source de revenus supplémentaires pour ce qui est déjà un emploi à temps partiel et peu rémunéré.
  1. Constituer une main-d’œuvre qualifiée pour l’entretien des autobus scolaires électriques en développant les programmes de formation sur les véhicules électriques, en modernisant l’apprentissage et en garantissant aux mécanicien(-ne)s l’accès aux réparations grâce à des contrats d’approvisionnement.
  • Les emplois dans la fabrication et la maintenance sont parmi les plus touchés par l’électrification. Contrairement aux systèmes à combustible fossile, les groupes motopropulseurs électriques comportent moins de composants, nécessitent moins de temps d’assemblage et coûtent environ deux fois moins cher en entretien. Cela soulève des inquiétudes quant à d’éventuelles pertes d’emplois et réductions d’heures de travail à long terme.
  • Le rapport constate une grande variation géographique en matière de pénurie de compétences, d’accès aux programmes de reconversion professionnelle et de concentration des nouveaux emplois au Québec et aux États-Unis.
  1. Permettre l’utilisation sécuritaire des autobus scolaires remotorisés (p. ex. autobus à diesel ou à essence) qui ont été convertis pour fonctionner à l’électricité en finançant des projets pilotes, en mettant à jour les normes de sécurité et en autorisant l’utilisation prolongée de véhicules convertis certifiés.
  • Un nombre croissant d’entreprises en Amérique du Nord et en Europe convertissent les autobus scolaires à diesel en modèles électriques. Cette approche réduit considérablement les impacts environnementaux et sociaux tout au long du cycle de vie, pour environ la moitié du coût d’un nouvel autobus scolaire électrique.
  • De telles conversions restent rares au Canada. Les normes de fabrication canadiennes actuelles (CSA D250) interdisent aux autobus remotorisés de transporter des élèves, car la conversion annule la garantie du fabricant d’équipement d’origine, rendant le véhicule inéligible à l’immatriculation ou à l’assurance.
  1. Réglementer l’exportation des autobus scolaires mis hors service vers des pays où les protections sont moins strictes en mettant à jour les contrôles à l’exportation.
  • Dans la plupart des provinces et territoires du Canada, les autobus à carburant fossile et les autobus électriques sont soumis à une mise hors service obligatoire après 12 ans de service.
  • Aucun cadre réglementaire fédéral ou provincial ne régit actuellement la mise au rebut des autobus scolaires à carburant fossile ou électriques.
  • Les autobus scolaires diesel obsolètes sont souvent exportés vers des pays où les normes de qualité de l’air et de sécurité des véhicules sont moins strictes. Cette pratique transfère la charge environnementale vers des populations déjà défavorisées, où l’utilisation continue d’autobus à fortes émissions contribue à la mauvaise qualité de l’air et aux problèmes de santé qui y sont liés. 
  1. Adopter des politiques de responsabilité élargie des producteurs pour les batteries de véhicules électriques afin d’assurer un recyclage sûr, de responsabiliser les fabricants et de protéger les communautés contre des dommages environnementaux disproportionnés.
  • Au Canada, la seule initiative coordonnée pour l’élimination des batteries de véhicules électriques est le Programme de récupération des batteries de véhicules électriques, un programme volontaire lancé en 2023 par 16 fabricants.
  1. Adopter des mesures de protection sociale, environnementale et du travail plus strictes afin de promouvoir la responsabilité des entreprises et le respect des droits des peuples autochtones dans le domaine de l’exploitation des ressources.
  • Sur le plan international, le Canada a un rôle démesuré à jouer en ce qui concerne les implications de l’extraction des ressources en matière d’équité. Près de la moitié des sociétés minières cotées en bourse sont basées au Canada. Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a mis en évidence un schéma récurrent de violations des droits humains par les industries extractives canadiennes opérant à l’étranger. Ces violations sont souvent bien documentées, mais insuffisamment dissuadées par le gouvernement canadien, ce qui rend nécessaire l’adoption de normes mondiales en matière d’entreprises et de droits humains.
  • Au niveau national, l’exploitation minière des véhicules électriques devrait entraîner une augmentation de 15 % de l’emploi au Canada, mais la majorité des entreprises prévoient que les salaires resteront stables. Le Canada se classe au deuxième rang mondial pour le nombre d’accidents miniers connus. Les travailleur(-euse)s ne sont pas en mesure de défendre de meilleures conditions. La couverture syndicale dans le secteur privé (y compris le secteur minier) est passée de 21,3 % en 1997 à 15,5 % en 2023. Alors que les femmes et les immigrant(e)s représentent respectivement environ 50 % et 30 % de la main-d’œuvre canadienne, ils et elles ne représentent que 16 % et 10 % de la main-d’œuvre minière.
  • L’exploitation minière présente à la fois des défis et des opportunités pour les communautés autochtones du Canada. Si les investissements publics dans les infrastructures minières peuvent détourner des ressources des services essentiels et si les allégements fiscaux réduisent les recettes publiques, l’exploitation minière offre également des avantages directs. Par exemple, les accords sur les avantages pour les communautés (CBAs) peuvent fournir des revenus aux gouvernements autochtones et des possibilités d’emploi, car les autochtones représentent 12 % de la main-d’œuvre minière alors qu’ils ne constituent que 4 % de la main-d’œuvre nationale. 

 

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